Résumé
La résistance des personnes esclaves a longuement été étudiée par les historiens et les historiennes, que ce soit aux Antilles, aux États-Unis, ou même en Amérique du Sud. Les travaux se sont intéressés notamment à l’agentivité des individus asservis, associant très étroitement celle-ci à la résistance. Plus récemment, le concept de degrees of freedom a émergé de l’historiographie américaine de l’esclavage. Anne-Claire Faucquez parle quant à elle d’«instants de liberté». Ces concepts tardent à être appliqués au cas de la Nouvelle-France. Dans le cadre de notre mémoire de maîtrise, nous parlons d’une marge d’autonomie que réussissent à s’approprier les personnes esclaves dans le cadre de leur état servile. Cette marge nous semble plus répétitive et présente que des instants éparpillés.
L’étude d’une quarantaine de procès dans lesquels les personnes esclaves de la vallée du Saint-Laurent sont impliquées comme témoins, accusées ou victimes, nous permet de constater que ces personnes réussissent à s’approprier, dans le cadre de leur servitude, différentes marges d’autonomie. L’étendue et la signification de ces marges varient d’une personne à l’autre. D’une part, il existe une marge d’autonomie normalisée qui est tolérée par les maîtres et par la communauté du milieu dans lequel les personnes asservies vivent. D’autre part, certains individus s’approprient une marge d’autonomie « extraordinaire » qui sort des normes sociales et juridiques.
En plus de l’aspect de la résistance au pouvoir, nous souhaitons également aborder celui des relations sociales qu’entretiennent les individus. Que ce soit entre esclaves, entre esclaves et membres de la communauté ou encore entre esclaves et maîtres, les relations de pouvoir sont omniprésentes dans le quotidien des personnes asservies. Ainsi, le but de cette présentation sera d’examiner la place du pouvoir, privé ou colonial, dans la vie des esclaves de la Nouvelle-France, et comment ceux-ci s’y adaptent et y résistent.