Résumé
L’histoire de la déficience intellectuelle au Québec depuis les années soixante est riche en bouleversements. Au cours de cette décennie, la province fut le théâtre d’un vaste mouvement de désinstitutionnalisation qui visa la réintégration et le maintien dans la communauté des personnes vivant avec une déficience intellectuelle et de celles vivant avec des troubles de santé mentale. Lors des décennies suivantes furent fondés les premiers centres d’entraînement à la vie, les droits des personnes vivant avec une déficience intellectuelle furent affirmés par la Loi assurant l’exercice des droits des personnes handicapées et se multiplièrent les rapports, énoncés de principes et politiques publiques affirmant les intentions du gouvernement de la province de mettre en place et développer l’intégration sociale et scolaire.
Si ces éléments de l’histoire de la déficience intellectuelle au Québec grâce à des travaux menés sur l’évolution des soins, services et discours dans ce domaine sont bien connus, l’expérience des individus vivant avec ce handicap depuis 1960 l’est moins. C’est ce que nous avons voulu pallier dans le cadre de nos recherches portant sur le vécu de quatorze patients institutionnalisés à partir de 1951 à l’Hôpital Saint-Michel-Archange. En présentant leur parcours, nous explorerons l’idée qu’une histoire «au ras du sol» s’intéressant à l’expérience passée des individus vivant avec une déficience intellectuelle, population dont la voix est rarement audible hier comme aujourd’hui, permet de dresser un portrait sensiblement différent de la période de désinstitutionnalisation qu’a connu le Québec.