Serge Jaumain
En 1927, dans un article intitulé « Ceux qui sont des nôtres », Le Canada rend un hommage appuyé à Jean Goulet, un musicien montréalais d’origine belge qui vient de se voir décerner par son pays natal le titre de chevalier de l’Ordre de la Couronne.
Jean Goulet, son frère aîné Joseph-Jean et son fils Charles ont marqué la scène musicale montréalaise dans les premières décennies du 20e siècle. Les deux premiers ont pris part à l’aventure du parc Sohmer dont le directeur, Ernest Lavigne, attira près d’une cinquantaine de musiciens d’origine belge, provoquant ainsi une sorte de petite « migration musicale ». À l’image des frères Goulet, plusieurs d’entre eux choisirent de s’établir à Montréal où ils s’intégrèrent à la société locale. Grâce notamment aux archives de la famille Goulet, il est possible de suivre ce processus mais aussi d’examiner les liens forts qu’ils maintinrent avec leur pays natal. La distinction accordée à Jean Goulet par le souverain belge en est un bel exemple, tout comme le fait que son fils, Charles, ait parfait sa formation musicale à Liège avant de revenir au Québec où il s’imposera comme un musicien et chanteur très en vue, créant notamment les « Variétés Lyriques » et les « Disciples de Massenet » avant d’occuper pendant près deux décennies le poste de secrétaire du Conseil des arts de la région métropolitaine de Montréal. L’analyse du parcours de ces artistes illustre la manière dont la scène musicale montréalaise contribua tout à la fois aux mobilités transatlantiques mais aussi à l’intégration de ces artistes dans la société québécoise.