Alain Beaulieu
Les 15 et 16 septembre 1760, une semaine après la capitulation de Montréal, le surintendant britannique des affaires indiennes, William Johnson, concluait à Kahnawake un traité de paix avec les Autochtones de la vallée du Saint-Laurent, alors réunis au sein de la confédération des Sept Nations du Canada. Cette entente, qui faisait suite à un traité de neutralité rapidement négocié quelques jours plus tôt à Oswegatchie, sur le Haut-Saint-Laurent, officialisait l’entrée de ces anciens alliés des Français dans le réseau britanno-américain connu sous le nom de Covenant Chain. Une des clauses de ce traité suscite depuis quelques années beaucoup d’intérêt en raison de son éventuelle portée juridique : celle concernant la réouverture de la route entre Montréal et Albany, fermée dans le contexte de la guerre de Sept Ans. Au-delà des interrogations juridiques qu’elle suscite, cette disposition prenait tout son sens dans le contexte des échanges commerciaux réguliers qui existaient entre Montréal et Albany avant la conquête de la Nouvelle-France. Souvent qualifiés d’illégaux, ces échanges, dans lesquels les Mohawks de Kahnawake jouaient un central, bénéficiaient d’une large tolérance de la part des autorités tant françaises que britanniques, en raison des avantages que chacun en retirait. Cela n’excluait toutefois pas les tentatives pour contrôler et encadrer les déplacements associés à ce commerce, des mesures qui s’intensifiaient en période de guerre. L’axe formé par le Richelieu, le lac Champlain et le fleuve Hudson devint ainsi l’un des endroits où s’exercèrent, avec plus ou moins de succès, les premiers efforts des puissances européennes pour contrôler et encadrer les mouvements des populations autochtones sur le territoire. Prenant comme point de départ le traité de Kahnawake de 1760, cette communication se propose de présenter, en remontant jusqu’au début du 17e siècle, les moments clés de ces tentatives, les enjeux qui y étaient associés et les résistances qu’elles ont provoquées.