Résumé
En restaurant les lois et usages du Canada en matière de propriété, l’Acte de Québec de 1774 faisait plus qu’établir un régime duel de droit au Québec. Cette loi du parlement britannique instaurait un système juridique tourné vers le passé, particulièrement pour ce qui est de l’héritage juridique français. Monument de l’identité canadienne-française avant l’adoption du Code civil du Bas-Canada, la Coutume de Paris invitait les juristes à faire du tourisme dans les décombres de l’Ancien Régime laissés par la Révolution française et le Code civil napoléonien. En exhumant les vieilles ordonnances des monarques et les arrêts des gouverneurs et intendants, en dépoussiérant les registres du Conseil souverain et parfois les dossiers des tribunaux du régime français, les hommes de loi bas-canadiens traçaient en outre une ligne du temps propre aux fictions de la science du droit positif, en plein essor au 19e siècle. Ils construisaient les premiers lieux de la mémoire canadienne-française, l’architecture du grand récit qu’un François-Xavier Garneau tissa avec plus d’élégance au milieu du siècle. Certains, tels Joseph-François Perrault ou Louis-Hippolyte Lafontaine, se sont improvisés historiens (ou du moins chroniqueurs) et ont forgé les matériaux préalables d’une vision «monumentale» de la Nouvelle-France. La présente proposition est basée sur une recherche dans les documents judiciaires, les publications et les notes de certains de ces juristes.