Richard LeBlanc
Le traitement des Acadiens durant la déportation de 1755-1763 a été abordé par John Mack Faragher, Adeline Vasquez-Parra et Christopher Hodson, parmi d’autres. Toutefois, l’expérience spécifique des enfants n’a pas été systématiquement thématisée. Ma communication propose de thématiser et spécifier cette expérience dans les colonies britanniques entre 1755 et 1763. L’objectif est de démontrer que l’arrachement des enfants acadiens aux familles nucléaires a constitué un déplacement forcé contribuant à détruire plus profondément la structure familiale acadienne déjà affectée par la dispersion dans diverses colonies britanniques.
Il s’agira ainsi d’avancer une typologie de déplacement ayant mis en place des pratiques assimilatrices de déracinement juvénile : le déplacement de la servitude, celui de l’éducation et celui de la vente d’enfants. De fait, de nombreux enfants acadiens réfugiés ont été capturés et déplacés de telle sorte que les colons britanniques réussissaient à « les forcer à travailler » (Boudreau, 1757). D’autres enfants acadiens, apparemment devenus « compétents dans les modes, les affaires et la langue anglaises » et allant « à l’école » anglaise, ont aussi été arrachés « de force à leur parents » (Stoddard et al., 1757). D’autres enfants encore ont été « enlevés et transportés » là « où ils ont etés Vendus » (Babin, 1763). En examinant la vente, l’éducation et la servitude des enfants comme trois déplacements séparateurs forcés, ma démonstration jette la première lumière significative sur la procédure tripartite de destruction des familles nucléaires acadiennes qui radicalisait la violence génocidaire déjà à l’œuvre.