Résumé
Julie Francoeur
En 1800, la Magdalen Society of Philadelphia ouvre ses portes, avec pour but d’héberger des jeunes femmes dites de mauvaise vie et de les aider à reprendre une place « honnête » en société. En janvier 1850, c’est au tour de la Maison Ste-Madeleine de voir le jour à Québec, avec les mêmes objectifs. La première institution est administrée par un board of managers regroupant l’élite épiscopalienne de Philadelphie, ainsi que des membres d’autres confessions protestantes, alors qu’à Québec, la Maison est confiée à Marie-Josephte Fitzbach, une pieuse veuve catholique. Ces petites institutions de rédemption ne sont pas les seules à apparaître tout au long du 20e siècle en Amérique du Nord, en France et dans les îles britanniques, mais elles ont la particularité d’avoir grandi et d’être restées bien ancrées dans le paysage urbain à une époque où les œuvres de charité privées peinent à répondre aux besoins des populations les plus vulnérables, dont les femmes et les enfants.
Cette communication explore la circulation de ce modèle de prise en charge, d’hébergement et de réhabilitation de femmes considérées déviantes (prostituées, mères célibataires et adolescentes désobéissantes, entre autres) au sein de ce que nous appelons les « maisons pour Madeleines ». Ces institutions semblent dépasser les cadres nationaux et confessionnels, alors que les autorités civiles et religieuses cherchent des moyens de cacher le visage de la pauvreté et de remettre ces « brebis égarées » sur le prétendu droit chemin, en favorisant paradoxalement leur embauche en service domestique, métier très précaire.