Résumé
Au sortir de la Grande Guerre, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada anglais voient naître une multitude d’associations militant pour la paix (Bouchard, 2015). Le Québec fait exception : il n’en compte en effet aucune de langue française (Socknat, 1987). Pourquoi cette singularité ? Serait-elle liée à la place prise par l’Église dans la vie sociale, associative et intellectuelle des Canadiens français? Cette communication porte sur le rapport qu’entretient l’École sociale populaire, association jésuite ayant pour but la propagation de la doctrine sociale de l’Église, avec la paix durant l’entre-deux-guerres. Les messages de paix des catholiques sont la manifestation d’un rapport au monde spiritualiste (Bock et Meunier, 2011) dont l’une des finalités est la recherche de la cohésion sociale. Cette recherche multiforme de l’ordre passe par l’exclusion ou l’acceptation des minorités religieuses au Canada, notamment la communauté juive, par la promotion du syndicalisme catholique, dont l’aboutissement est le corporatisme d’association, dans le but de pacifier la mobilisation ouvrière, et par une attitude conciliatrice, voire loyaliste, envers l’autorité britannique et le gouvernement canadien dans le but d’éviter d’antagoniser la majorité anglophone. Aussi les jésuites se rangeront-ils derrière l’effort de guerre du gouvernement canadien durant la seconde guerre mondiale, d’autant plus qu’ils adhèrent à la condamnation du nazisme formulée par Pie XI.
Le dépouillement de L’Ordre nouveau, imprimé bihebdomadaire produit de 1936 à 1940 par l’École sociale populaire constituera notre source principale. L’Ordre nouveau articule une définition transcendantale et universaliste de l’identité canadienne-française, qui n’a pas autant intéressé l’historiographie que les discours nationalistes de Lionel Groulx ou d’Henri Bourassa.