Résumé
Dans Des Sauvages publié en 1603, Champlain décrit une célébration à laquelle il assiste et qui célèbre la victoire de ceux qu’il nomme les Montagnes, Estechemins et Algoumequins sur les Iroquois. Cette communication présente une réflexion sur cet événement identifié par plusieurs historiens intéressés par la constitution de la mémoire coloniale comme le moment fondateur d’une alliance franco-autochtone, un moment clé de la genèse de la Nouvelle-France qui se concrétise cinq ans plus tard dans l’établissement d’un poste de traite à Québec. Je propose une réévaluation de l’interprétation de cette rencontre à travers une relecture du texte de Champlain et une réflexion sur les événements qui ont précédé et suivi cette alliance. L’établissement par Chauvin en 1600 d’un poste de traite à Tadoussac laisse supposer qu’une entente entre les Français et les Autochtones de la région avait déjà été conclue. Le choix malheureux de l’île Sainte-Croix en 1604, suivi du transfert à Port-Royal en 1605, ainsi que les recherches de Champlain le long de la côte Atlantique pour un endroit plus propice à l’installation d’une habitation, démontrent que «l’alliance» de Tadoussac pesait peu dans les choix des administrateurs coloniaux. Revisiter la mémoire coloniale et la comparer avec la mémoire autochtone permet ainsi d’obtenir une perspective plus nuancée sur cet événement qui, dans ce jeu de mémoires, a des ramifications jusqu’au présent.