Résumé
Nous connaissons les mots tranchants, sarcastiques et définitifs de William J. Eccles pour dresser la cérémonie des états généraux du Canada du début de l’automne 1672 comme la scène inaugurale de la « despotic form of government » du comte Frontenac en Nouvelle-France.
Tout entier engagé dans sa charge contre la figure traditionnelle du héros campé dans les habits mythiques du sauveur de la colonie française américaine, l’historien interprète le rituel de cette prestation de serments comme le geste liminaire d’un homme qui, faute de grandeur et de gloire véritables, se complaît dans le simulacre et dans le grandiose. En quelques mots, toute autre interprétation politique de cette initiative est balayée pour n’y reconnaître que la vanité grand seigneur et le ridicule tragique d’un aristocrate décadent, médiocre et endetté.
A l’opposé de cette interprétation singulièrement réductrice, il nous paraît nécessaire de mobiliser les ressources interprétatives plus complexes d’une politique de la représentation qui permet d’éclairer bien autrement les intentions constitutionnelles d’un artisan essentiel de l’état politique du Canada dans le moment crucial d’une institutionnalisation partagée entre une inspiration impériale et un horizon colonial.